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    25. Transat retour: Bermudes-Açores
27 mai au 09 juin 2008
 
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J1 - Mardi 27 mai - Départ groupé

Nous quittons Saint Georges et les Bermudes à 14h locales, soit 17H en temps universel (UTC), le mardi 27 mai. Destination prévue: Horta, sur l'île de Faial.

Nous n'avons pas pu faire le plein de gaz, et n'avons donc qu'une bouteille Camping Gaz de 5l pleine et une bien entamée (sur 3 au total). Aux Bermudes, il n'y a que du propane et personne n'a voulu remplir nos bouteilles de butane avec. Dans les autres pays, ils étaient moins scrupuleux!

C'est dommage pour une nav de 15j environ, mais c'est comme ça! Tant pis, nous mangerons plus souvent des repas froids!

Nous partons en même temps que Zee van tijd ("Mer de temps", expression hollandaise qui signifie que l'on a beaucoup de temps devant soi...), le bateau hollandais rencontré à Trinidad.

3 autres bateaux hollandais -- Camelot, Loesje et Flux -- sont partis un peu plus tôt.

Nous avons été particulièrement attentifs à la météo ces derniers jours, et nous le serons tout autant pendant la traversée. En effet, contrairement à la transat aller qui bénéficie de la régularité des alizés, le retour est beaucoup plus variable. La route sera donc en permanence ajustée en fonction des nouvelles prévisions et aussi, bien sûr, des conditions réellement rencontrées.

Après près de 2h au moteur face au vent pour sortir du chenal d'entrée de Saint Georges, nous sortons les voiles et c'est parti!

Bonne nouvelle, le vent est plus à l'est que prévu, et nous pouvons faire une route presque nord-est, donc pas trop loin de la route directe.

Après 6 heures de nav, nous retrouvons les 2 autres bateaux hollandais, plus lourds, qui ont du mal à "décoller" avec ce vent un peu faible (<15N).

Le vent se stabilise ensuite à 15N, et nous passerons toute la soirée, puis toute la nuit, à 4 bateaux! C'est vraiment agréable comme départ de transat, et du coup, pas d'angoisse! Et puis, ça change de la transat aller, pendant laquelle nous n'avions pas vu un voilier! Mais nous savons que ça ne durera pas: plus grands, les autres bateaux sont plus rapides que nous, et leurs équipages plus expérimentés, et surtout composés de plusieurs adultes : ils finiront par nous distancer!

Les enfants ont droit à une séance de ciné avant le repas. Mais sont prévenus que ce ne sera pas tous les jours!

D'ailleurs, nous avons aussi sorti l'une des nouvelles armes anti-ennui: 5 dés achetés à un bazar juste avant le départ: quelques parties de Yam's (ou Yatsee) ont permis de faire passer cette première journée plus vite.


J2 - Mercredi 28 mai - J2 - Les écarts se creusent

Quelques grains, un vent très variable, plutôt faible, un ciel toujours chargé, mais finalement pas de souci pendant cette première nuit. Autour de nous, les feux hollandais nous rappellent que nous ne sommes pas seuls!

Au matin, 2 bateaux sont loin devant mais restent visibles (en tous cas entre 2 pluies) et nous sommes bord contre bord avec Camelot.

Depuis le départ, la mer est belle: aujourd'hui, il y a école!

Fleur va se coucher, les enfants rangent le bazar dans les cabines et les coloriages / découpages dans le carré... la classe à 4 niveaux peut commencer! Aujourd'hui, maths pour Juliette et Marin, français pour Philippine et Domitille.

Nous croisons notre premier cargo. Il passe entre le groupe de tête et nous, preuve que nous sommes déjà assez éloignés les uns des autres.

17H: 122M parcourus en 24h, 248 depuis le départ.

Vent irrégulier toute la journée, de 0 à 25N. Dans la soirée, plus de vent du tout, nous mettons le moteur, ça nous permet de faire du froid, de recharger les batteries, et de recoller au peloton de tête.

Vers minuit, nous croisons notre deuxième cargo de cette transat.


J3 - Jeudi 29 mai - Vent faible - Ciseaux - Seuls!

La pétole dure toute la nuit: nous restons 11h au moteur, à un régime plus élevé que raisonnable, pour rester au contact des Hollandais.

Ceux-ci ont pour la plupart une autonomie en diesel bien supérieure à la nôtre, et n'hésitent donc pas à utiliser le moteur pour conserver une bonne vitesse moyenne!

Nous savons que nous ne pourrons pas nous permettre ce luxe à nouveau: avec 300l de diesel, nous n'avons que 4 à 5 jours d'autonomie, et il faut en garder le maximum pour les derniers jours: en effet, nous risquons alors de nous retrouver au beau milieu de l'anticyclone des Açores, donc sans vent!

Le moteur sera dorénavant utilisé au ralenti, dans le seul but de conserver un minimum de vitesse, sans laquelle on ne peut plus tenir le cap. Et pour recharger les batteries, nous privilégierons le groupe électrogène (qui lui, consomme de l'essence).

Aujourd'hui, le vent reste assez faible toute la journée: entre 5 et 10 nœuds. Nous nous faisons distancer par les Hollandais, 1 sous spi, les autres les voiles en ciseaux... voiles en ciseaux, au grand largue (vent de 3/4 arrière)? Mais comment font-ils? Nous passons un coup de VHF pour apprendre la manip:

La grand voile est bord sous le vent, avec une retenue de baume (système permettant d'éviter l'empannage accidentel... et généralement destructeur!), le génois est tangonné bord au vent: c'est ça l'astuce! Jusque là, il ne m'était pas venu à l'idée que le bord d'attaque du génois (c'est à dire celui par lequel le vent entre dans la voile), pouvait être la chute et non le guindant!

Nous notons l'explication (merci Sjoerd du bateau Camelot!), puis nous mettons à l'œuvre. C'est aussi compliqué que de mettre le spi, aussi prenons-nous le temps de la préparation: de quel côté du faux-étai faut-il mettre le tangon, à quelle hauteur le fixer sur le mât, où doivent passer le hale-bas, le hale-haut, chacune des écoutes... (là je fais exprès pour Olivier Tch. ;-))


Lorsque nous sommes prêts, nous envoyons, et après quelques réglages, Apache se retrouve en "butterfly configuration", comme disent les Hollandais, et nous gagnons un nœud de vitesse, passant de 3,5 à 4,5N! Avec 8 ou 9 nœuds de vent, ce n'est pas mal, et c'est le genre de détail qui peut nous faire gagner une journée ou deux!

Mais nous ne maîtrisons pas suffisamment cette configuration, et nous voyons nos compagnons s'éloigner inexorablement! En fin d'après-midi, seul Loesje reste visible, à près de 6M devant nous.

17h: 102M parcourus en 24h, 350 au total.



Apache toutes voiles dehors ;-)        


Le vent devant en principe rester stable, nous décidons de rester en ciseaux pour la nuit.

Mais vers 22h, le vent tourne plus au sud et nous devons empanner. Avec le génois tangonné, la manœuvre n'est pas simple... il nous faut une bonne heure pour enrouler correctement le génois retenu par le tangon, retirer puis remettre en place le tangon sur l'autre bord, comprendre où refaire passer les manœuvres... renvoyer le tout, et régler les écoutes.

Pendant ce temps, Loesje a disparu dans la nuit noire. Cette fois, plus personne à l'horizon!

Le vent est décidément trop instable. Nous rentrons le génois, rangeons le tangon. Nous conservons seulement la GV, plus difficile à affaler que le génois. C'est une mauvaise idée, mais la fatigue aidant, je choisis la facilité du moment...


J4 -Vendredi 30 mai - Vent faible - Dauphins - Grisaille

Pendant la nuit, encore 1 empannage, laborieux: il faut retirer le frein de bôme et faire passer la GV sur l'autre bord... en maîtrisant la manip pour éviter que le vent ne prenne brutalement la voile à revers. manœuvre un peu limite et pas envie de la faire à nouveau plus tard dans la nuit: nous nous résolvons à mettre Apache face au vent pour affaler la GV.

Le reste de la nuit se fait sous génois seul, et nécessite encore 2 empannages...

Le matin, nous sommes HS, parce que nous faisons toutes ces manœuvres à deux; du coup, nos quarts ne sont pas du tout respectés, et nous ne dormons quasiment pas. C'est le moment de sortir les super vitamines achetées aux Bermudes, car après les nuits difficiles, la vie à bord continue: c'est déjà l'heure du biberon de Fleur, puis du petit-déjeuner... la mer étant très plate, Carole a même le courage de faire l'école!


La mer est plate, car il n'y a pas du tout de vent. Nous devons mettre le moteur pendant près de 4 heures (2 heures à 1500t/mn pour charger les batteries, puis à régime réduit pour maintenir le cap).

Dans l'après-midi, entre 2 averses, un groupe d'une trentaine de petits dauphins se rapproche du bateau et joue à l'étrave un quart d'heure, pour la grande joie des enfants! "Ça faisait longtemps", remarquent-ils!

Il fait froid et il pleut sans arrêt tout le reste de la journée. Nous n'y voyons pas à plus de 100m.



Vu l'ambiance, et aussi parce que tout le pain de mie est en train de moisir, aujourd'hui, nous faisons du pain perdu pour le goûter... pour le plus grand plaisir de Philippine qui en réclame depuis le départ. Cette transat retour est vraiment différente: alors qu'à l'aller, nous avions chaque jour un peu plus chaud, un peu plus soif, cette fois, on se dirait en automne, et même les menus s'en ressentent!

17h: 100M en en 24h, 450 au total.

Nous avons définitivement perdu le contact avec les Hollandais: de temps en temps, nous percevons des bribes de conversation à la VHF. Mais ne parvenons pas à les contacter.

En fin de soirée, nous apercevons un feu au sud, loin à l'horizon. Un voilier? Nous ne saurons pas: il ne répond pas à notre appel radio.


J5 - Samedi 31 mai - Pas de vent

Encore une nuit mouvementée: les changements d'orientation du vent nous contraignent à 4 virements de bord: encore une grosse différence avec la transat aller, où l'on n'avait fait que 2 ou 3 empannages sur toute la traversée!

Au réveil, Domitille nous dit: "Plus qu'un jour!". Depuis une bonne semaine, elle compte les jours qui la séparent de son anniversaire!

Oui Domitille!... En attendant, ce matin il y a école!

Vers 16H, nous croisons notre 3ème cargo.

Peu après, nous sommes contactés par Fly away, un voilier Hollandais (encore un!). Il est à une douzaine de milles en avant. Plus grand qu'Apache, il est aussi plus rapide... nous nous retrouverons peut-être aux Açores!


En tous cas, c'est bien sympa d'avoir quelqu'un à qui parler presque tous les jours sur cet océan!

Le vent, déjà faible toute la matinée, est nul pendant près de 2h cet après-midi: nous mettons le moteur au ralenti. Ralenti: c'est la vitesse du bateau aujourd'hui: entre 3 et 4 nœuds. :-(

17h: 100M parcourus en 24h, 450 depuis le départ.

Le soir, le vent fait son retour: 15 à 20N, Apache glisse à 6,5N.



J6 - Dimanche 1er juin - 5 ans Domitille - Enfin du vent! Antenne BLU HS

Le vent monte encore pendant la nuit, et nous réduisons la toile progressivement, pour finir avec 3 ris pris dans la GV, et 2 dans le génois.

Nous croisons un 4ème cargo, qui traverse en sens inverse.

A 7h30, nous entrons tous dans la cabine de Domitille: "Joyeux anniversaire!". Après les cadeaux, nous mangeons au petit déjeuner le gâteau au chocolat préparé par Carole pendant son 1er quart.

Aujourd'hui, pas d'école: c'est la règle, les jours d'anniversaire sont fériés sur Apache, et les enfants ne l'ont pas oubliée!


Domitille la grande fille                 


C'est une très belle journée de nav: mer toute plate, soleil, au bon plein avec un vent régulier entre 12 et 20N, Apache ne descend pas sous les 7 nœuds, et se permet régulièrement quelques minutes à plus de 9,5N! Merci le Gulf Stream!

Le vent tourne progressivement de l'Est au sud-est, nous permettant de reprendre une route plus directe sur les Açores: jusque là, nous étions en effet coincés au près serré sur une route trop nord.

Dans l'après-midi, nous regardons un DVD piraté acheté dans la rue au Venezuela: langage et sous-titres en espagnol!

Sortant jeter un œil alentour toutes les 15 minutes pendant la séance ciné, nous avons la surprise de découvrir un cargo nous croisant à quelques centaines de mètres!... Oups! Il est apparu sans prévenir celui-là!

En fin d'après-midi, nous passons à 50 mètres d'une perche d'homme à la mer (la deuxième après celle de la Mer des Sargasses)... brrr!...

On trouve d'ailleurs beaucoup trop d'objets flottants, même au beau milieu de l'océan... bouées, bidons, seaux, bouteilles, canettes, sacs en plastique... Quel dommage! Nous avons même vu passer un paquet de pain de mie!... Nous aussi, nous jetons le pain de mie quand il est moisi (ce qui a tendance à arriver très vite dans cet environnement humide!), mais nous prenons quand même le temps d'enlever l'emballage en plastique!


On trouve aussi plein de petites bouées rose-violet encore gonflées et dont le plastique est comme fondu et collé par le soleil... c'est du moins ce que l'on croit au début.
Mais il y en a tellement que ça parait étrange... A y regarder de plus prêt, il s'agit en fait de méduses flottantes!

17h: 140M en 24h, 590 depuis le départ.

Par sécurité, et aussi parce que nous n'avons pas envie de renouveler l'expérience fatigante des nuits précédentes, nous prenons 2 ris dans la GV avant la nuit. D'ailleurs, ça tombe bien, le vent monte à 20N.



Même les méduses se prennent pour des     déchets en plastique!                  


En plus du côté rassurant, la présence des autres bateaux permettait de discuter des options de navigation selon la météo. Depuis la séparation, nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes pour l'analyse des prévisions météo.

Mais il y a plus ennuyeux: l'antenne de la BLU (nous permettant de capter la météo et les conversations avec les voiliers Hollandais) ne marche plus! Plus moyen donc de déterminer à l'avance les éventuelles zones de mauvais temps et (d'essayer) de les éviter. Nous ne pouvons pas non plus suivre l'évolution de l'anticyclone des Açores: or si passer en plein milieu est déjà pénible (pas de vent pendant quelques jours), passer au sud est pire, puisque cela signifie le vent et la mer dans le nez! Et nous aimerions bien éviter une fin de transat trop désagréable!

Nous espérons donc passer régulièrement à portée de VHF d'autres bateaux pour pouvoir leur demander les prévisions météo!

Nous tentons régulièrement des appels radio, mais pour le moment, pas de réponse.

Cette fois, ça y est, nous sommes seuls!


J7 - Lundi 2 juin - Grosse fatigue! - Encore une très belle journée de nav!

La mer est hachée toute la nuit. Le bateau est secoué par des petites vagues irrégulières, et, lancé à plus de 7N, tape régulièrement sur les plus grosses. Notre sommeil est à chier haché, lui aussi!...

Petit point lumineux loin derrière, puis loin devant loin devant plus tard, notre 6ème cargo nous double en pleine nuit: bien plus rapide, il arrivera quelque part en Europe ou en Afrique une bonne semaine avant nous!

A l'aube, 2 heures de pluie pendant lesquelles il n'y a pas de vent. Nous mettons le moteur et prenons notre mal en patience... et puis le vent revient, ramenant le soleil avec lui.


Ecole le matin et jeux l'après-midi pour les enfants, avec la sortie du 2ème tue-l'ennui: le Spirograph! Fleur prépare une carrière d'interprète: elle sait faire le poisson, le singe, le chat, le cochon, le lapin... bref elle sait faire quasi tout les animaux... "-Mais Fleur, comment ils font les hommes?" "-Aya!"

Pendant ce temps, les parents font à tour de rôle de vaines tentatives de siestes... Fatigués! Vraiment fatigués! Nous nous consolons en nous disant que nous arriverons bientôt au fameux palier constaté lors de la transat aller: une fois dans cet état, ça ne pourra pas être pire!



Et le poisson, il fait comment?            

Et puis, les conditions sont idéales pour naviguer, et ça, ça fait vraiment du bien! Le vent est parfaitement régulier à 15N toute la journée, Apache glisse souplement à plus de 7N de moyenne et ces dernières 24h, nous avons parcouru 170M, soit 760 depuis notre départ des Bermudes! Pourvu que ça dure!

Le grand beau temps est aussi revenu, il fait à nouveau assez chaud pour ranger les pyjamas d'hiver (c'est à dire à manches longues... sortis aux Bermudes!!!). Les enfants dorment, et passent la journée torse nu,

Nous croisons un 7ème cargo; celui-ci fait route vers l'Amérique du sud.

Comme la veille, le vent fraîchit dans la soirée: l'occasion de prendre 2 ris dans la GV, que nous laisserons pour la nuit: ça évite la pression, les manœuvres en pleine nuit, bref... nous dormirons mieux! Nous ne faisons pas une course, et savons qu'il vaut mieux garder des forces jusqu'à la fin, on ne sait jamais (nous n'oublions pas la panne de pilote automatique à la fin de la transat aller!)


Mardi 3 juin - J8 - Mi-parcours - Encore une très belle journée! - Tiens, un voilier!

Une seule manœuvre pendant la nuit: nous prenons un ris dans le génois.

Notre 8ème cargo nous passe au ras de la jupe.

Le temps est légèrement voilé toute la journée. Le vent oscille entre 10 et 20 nœuds, la mer est très belle: toujours aidé par le Gulf Stream, Apache fonce entre 7 et 9 nœuds.

C'est assez confortable pour qu'il y ait école! Et oui, nous seulement, il faut bien la faire, mais en plus ça a l'avantage de faire passer la matinée plus vite! A l'aller, il n'y avait pas eu beaucoup école pour cause de mer trop agitée!

Dans l'après-midi, nous entendons un appel radio en anglais: "Ici le voilier Ciprina. Bateau aux environs de la position 37°30' Nord, 47°30' Ouest, me recevez-vous?"

Il vient de Martinique et se rend comme nous à Horta. Ça y est, les différentes routes de transat commencent à converger! Peut-être allons-nous commencer à rencontrer plus de voiliers?!

Nous discutons météo; il nous confirme que le cap direct sur Horta est ok, pour éviter une forte dépression en formation plus au nord, au niveau du 40°.

17h: 157M parcourus ces dernières 24h, soit 917 au total. Après 8 jours de nav, nous sommes à mi-chemin.

Nous prenons 2 ris dans la GV avant la nuit, Puis un ris dans le génois peu avant minuit.


Mercredi 4 juin - J9 - Nous pétons un câble! :-(    - 1ères baleines!

A l'aube, nous entendons un grand bruit dans le gréement, suivi par un ballottement anormal du génois. Il ne faut pas longtemps pour situer le problème: l'étai (le câble reliant la tête de mât à l'avant du bateau) est rompu au sommet du mât: le génois n'est donc plus tenu que par sa drisse, et plus grave, le mât n'est plus retenu vers l'avant que par le bas-étai: il risque donc de tomber à tout moment!

Nous sommes quand même bien secoués par cette mauvaise nouvelle... mais comme pleurer ne servirait à rien (quoique...), c'est parti pour l'opération de secours :

- Vite! Il faut trouver de quoi remplacer l'étai! Nous utilisons la drisse de spi, étarquée au maximum. Elle sera doublée plus tard par celle de génois... qui pour le moment est hélas indisponible!

- Il faut rentrer le génois qui continue à claquer. Oui mais comment? Nous n'osons pas utiliser l'enrouleur de peur de le casser lui aussi. Pas le choix: nous décidons d'affaler le tout: génois encore déroulé et tube d'enrouleur autour de l'étai. Au premier essai, le génois se prend dans les haubans, impossible de le décoincer sans rehisser le tout, ce que nous faisons. Nous prenons un peu d'angle par rapport au vent et reprenons. Cette fois, le génois, poussé par le vent, permet au tout de basculer doucement sur le côté du bateau. Pendant que Carole relâche la drisse de génois, je ramène la voile sur le bateau... en fin de manœuvre, l'extrémité du tube est posée sur le balcon arrière. Il dépasse de 4m, mais c'est le dernier de nos soucis!

- Retour à l'étrave: la patte métallique de fixation de l'étai à l'étrave s'est pliée pendant la manœuvre: cette pièce est foutue! Plus embêtant, ainsi tordue, on ne peut plus la démonter: le bas de l'étai reste donc fixé en l'état à l'étrave. Pas grave pour le moment.

- Au prix de gros efforts physiques, nous parvenons à sortir le génois (lourd et coincé entre le tube, le pont et les filières), puis à plier le génois (100m2 de toile rigide!).

- Il faut remplacer la voile d'avant. Apache dispose d'un étai largable sur lequel on peut monter une trinquette (voile de petite surface utilisée par gros temps). Nous installons le premier après avoir cherché et retrouvé l'estrope encore jamais utilisée (l'estrope est une rallonge qui fait le lien entre l'étai largable et son point d'attache sur le pont); nous sortons la trinquette de son sac, fixons les écoutes et la drisse, endraillons la voile puis la hissons sur ce nouvel étai.

- Nous doublons la drisse de spi avec la drisse de génois maintenant disponible.

- Ayé! Nous avons un gréement de fortune qui devrait faire l'affaire, tant que le temps est clément avec nous! Nous reprenons notre route, un peu plus sereins après ce gros coup de stress. Mais nous ne sommes pas certains non plus d'avoir fait tout ce qu'il fallait faire, de ne rien avoir oublié. Et cette VHF qui reste muette malgré nos appels...

Tout cela a duré près de 5h. C'est une chance que cela ne soit pas arrivé par gros temps! Le mât serait certainement tombé immédiatement, cassant tout ce qu'il peut dans sa chute et enfonçant les voiles dans l'eau, faisant basculer Apache lancé à pleine vitesse! Là nous n'aurions pas eu 5h pour régler le problème. Dans le meilleur des cas, c'est à dire si le mât était resté en place, nous aurions certainement été obligés de larguer l'ensemble génois - étai - tube - enrouleur, pour éviter le sur-accident!

Nous avions pourtant bien inspecté tout le gréement, et les haubans en particulier, avant le départ des Bermudes, et n'avions pas remarqué de faiblesses. Nous espérons qu'il y aura quelqu'un capable de réparer ça aux Açores...

Le point positif de cette affaire, c'est que nous avons pu étrenner notre belle trinquette toute neuve, et savons maintenant comment la mettre en place! Il était temps: nous parlons de faire un essai depuis avant le départ de Canet en septembre 2007!

Pour les enfants, le côté positif, c'est qu'ils ont échappé à l'école! Ils passent pourtant la matinée à jouer à la maîtresse, acceptant avec sourire les dictées et problèmes que Juliette distribue... il faudra que je pense à lui demander des tuyaux à l'occasion...

L'après-midi est beaucoup plus agréable: baleines, dauphins, "poissons multicolores"... nous sommes bien entourés! Ce sont les enfants qui prennent le clavier pour raconter tout ça (voir plus bas).

17h: 150M parcourus en 24h, 1067 au total.

Avec la nuit revient l'inquiétude: notre étai de fortune n'est évidemment pas aussi solide qu'un câble, et nous ne savons pas à quoi il peut résister. Nous prendrons dorénavant les ris bien avant la limite habituelle pour éviter de trop solliciter le haubanage. Pour le moment, le vent est aussi faible que pendant la journée: 5 à 8 nœuds. Nous laissons donc toute la toile dehors.

Mais nous avons mis les pinces coupe-boulons à une place facilement accessible: si l'accident devait arriver, ces longues pinces très puissantes nous permettront de sectionner les haubans pour larguer tout le gréement et essayer d'éviter les dégâts sur la coque.

Nous avons calculé que nous devrions avoir juste assez de gasoil pour finir le trajet tout au moteur, seul petit point de réconfort...

Les baleines, racontées par les enfants


On a vu des dauphins. Aussi, on a vu des baleines deux fois pour la même navigation!

Les 5 ans de Domitille sont arrivés le 1er Juin. Mais... On n'est plus le 1 er Juin.

Quand c'était l'anniversaire de Domitille, nous avions mangé un bon gâteau!
C'est cool, c'est super, c'est trop bien!

En plus, on a fait un repas que je n'aime pas, mais je l'ai fini plus vite que normalement.

Marin



On a vu 3 baleines! Papa a regardé sur l'ordinateur pour voir lesquelles c'était. Et c'était des baleines bleues, les plus GROSSES et les plus rares des baleines!

Il y en avait 2 qui allaient dans le même sens que nous et l'autre en sens inverse.
C'est celle-là qui a le plus respiré ! Sûrement pour aller dans les profondeurs! En tous cas elles étaient belles !

On a aussi vu des bonites, avec leurs reflets multicolores, à l'avant du bateau! Et des dauphins qui ne sont pas restés là très longtemps.

Philippine



On a vraiment de la chance! On était à s'ennuyer dans les cabines, quand Papa a crié "Baleines! Baleines!". On a accouru, et on a vu un gros jet jaillir de l'eau!

Alors, on a hurlé : "Ouais! Des baleines!". Et on est resté 10 min à les regarder (on ne voyait que le dos), et puis, comme après il n'y avait plus rien, on est re-rentré.

3 min après, Papa a crié: "Dauphins! Dauphins!". On est re-sorti, comme la première fois, Mais ils ne sont même pas restés 1 min! Bon! Pas grave, allez, on rentre!



RE-3MIN APRES Papa a RE-CRIE: " Bonites ! Bonites!". On est RE-SORTI, et RE- RENTRE! Que de RE-!

A un moment, Pim a dit à Papa: "Quand même, on a de la chance, hein?"

Juliette


Formidable, toutes ces baleines à moins de 100m, les enfants voudraient encore s'approcher... Nous reviennent alors des lectures indiquant que surtout, il ne faut pas passer entre la mère et son petit, elle le croirait en danger et viendrait nous secouer les voiles... Quelle belle théorie; et comment fait-on?

-"Bonjour Madame, désolé de vous déranger, vos petits sont dans le coin? Nous ne faisons que passer..."

Nous choisissons de nous en éloigner, un coup de queue ne nous arrangerait pas du tout, surtout avec ce mât...



Dessin de Domitille:                  
sous le "bateau", c'est elle qui se baigne!      

J10 - Jeudi 5 juin - Plus seuls! - Le temps se gâte - Champ de baleines

Faut-il préciser que le sommeil n'est pas très bon? A chaque mouvement un peu brusque du bateau, nous craignons que le mât ne nous tombe sur la tête! Il faut dire les vagues font rouler le bateau régulièrement, mouvement amplifié au sommet du mât...

Pendant la nuit, voyant un feu à l'horizon, nous lançons des appels radio pour demander les prévisions météo. C'est un cargo, le 10ème, qui répond. Mais nous avons du réveiller la personne de quart car elle ne semble pas disposée à nous les communiquer... Nous laissons tomber.

Un peu plus tard, c'est le voilier anglais Beyzano, parti des Bermudes le même jour que nous, qui répond. Il est 10M derrière nous. Il avait prévu une route directe pour l'Angleterre, mais une forte dépression sur la route le contraint à obliquer vers le sud. Nous faisons de même car cette dépression emmène sur notre route des vents de 30 à 40 nœuds. Avec un gréement dans cet état, mieux vaut éviter!...


Le vent monte ensuite à 15 N. Nous prenons 2 ris dans la GV pour être tranquilles. Tranquilles, si l'on peut dire!...

Au lever du jour, Beyzano est visible derrière nous. Nous attendons qu'il soit à notre hauteur pour relâcher les 2 ris et ainsi essayer d'aller à la même vitesse que lui.

Nous signalons à Beyzano notre "petit" problème et leur demandons ce que nous pouvons faire de plus pour renforcer notre étai provisoire. Non, rien d'autre à faire, mais ça reste quand même très préoccupant et ils partagent notre inquiétude.



Rencontre en pleine mer avec Beyzano     


Beyzano est en contact avec les Bateaux Hollandais par BLU. Après leur vacation du matin, Stephan, le skipper de Beyzano, nous rappelle: la dépression se confirme. Le mieux est de poursuivre sur cette route un peu trop sud pendant 2 jours à bonne allure (au moins 6N) pour atteindre une zone où les vents devraient être moins violents. Ils ont aussi discuté de notre étai, et pensent qu'en évitant de trop solliciter le mât nous devrions pouvoir arriver à bon port.

Nous naviguons bord à bord toute la journée. Quel réconfort! Ils sont aux petits soins avec nous, surtout quand ils apprennent la composition de l'équipage d'Apache. Ils nous appellent dès qu'ils ont une info météo, ou une suggestion pour notre gréement ou des conseils sur les choses à faire en cas de chute du mât (si le moteur est en marche, penser à l'éteindre immédiatement pour éviter que les manœuvres ne se prennent dans l'hélice, penser à avoir la VHF portable prête, parce que l'antenne de la VHF du bord est sur le mât...).

Avec la trinquette, notre surface de toile est beaucoup plus petite qu'avec le génois, et pour tenir les 6N, nous devons la plupart du temps utiliser le moteur en appoint.

Dans l'après-midi, nous apercevons une 3ème perche d'homme à la mer. Décidément, les hommes ne tiennent pas dans leur bateau par ici!!

Nous essayons de la récupérer en passant à ras. Mais la gaffe rate sa prise! Tant pis: pas question de perdre le temps d'une manœuvre à la voile! Et puis comme dit Carole, c'est un peu glauque quand même...

Pendant le petit détour pour s'approcher de la perche, Beyzano a pris un peu d'avance. Nous pensons mettre un peu de gaz pour le rejoindre, lorsque nous réalisons que nous sommes séparés de lui par un véritable champ de baleines, se déplaçant perpendiculairement à nous... le temps de nous demander quelle conduite tenir, nous sommes en plein milieu! Plutôt que faire une manœuvre brusque, nous préférons ne rien faire, et traversons ce champ miné finalement sans encombre!

Ouf! Autant on aimerait être plus proche quand on voit une baleine à 100m, autant on voudrait être ailleurs quand il y a partout autour des bestioles 2 à 3 fois plus lourdes que le bateau!

17h: 140M parcourus en 24h, 1206 depuis le départ de cette traversée.

Beyzano nous rappelle après la vacation BLU du soir: bonne nouvelle, il semble que la dépression ne soit pas si forte que prévue et qu'il ne soit plus nécessaire d'aller trop au sud. Nous reprenons donc notre cap direct sur Horta, en essayant de conserver une vitesse de 6N. Nous aurons tout de même pas mal de vent, mais rien de trop violent.


J11 - Vendredi 6 juin - V'là le mauvais vent!

Beyzano poursuit lui aussi sur cette route. Il nous explique qu'avec ce temps il préfère attendre pour reprendre sa route vers l'Angleterre, mais nous le soupçonnons de ne pas vouloir nous laisser seuls dans cette situation.

Nous ne protestons qu'à moitié: nous sommes bien contents d'avoir à nouveau une présence rassurante à nos côtés!

Pendant la nuit, le vent reste faible et un fort courant traversier nous oblige à mettre le moteur à haut régime pendant plusieurs heures: pas bon pour la consommation! Heureusement, peu avant l'aube, le vent remonte à 10-15 nœuds.

Au lever du jour: nous avons du monde autour de nous: derrière, Beyzano et un énorme cargo (le 11ème), qui va dans la même direction que nous, et devant, un autre voilier, probablement Ciprina, contacté la veille par radio et qui a choisi de conserver une route directe malgré la dépression...

Les prévisions météo nous réservent une mauvaise nouvelle: nous allons avoir des vents de 25-30N dès ce soir et pour au moins 3j... Trop tard pour essayer de les éviter! Dommage, si nous avions poursuivi vers le sud toute la nuit, nous aurions été à l'abri!

Probable dernier jour d'école de cette nav: après ça bougera trop!

Puis boum improvisée dans le cockpit: ça défoule! 1ère (et dernière) tentative de pêche: bredouille!


Le vent fraîchit progressivement. Nous avons 15-20N l'après-midi.

17h: 155M parcourus ces dernières 14h, 1362 au total.

Nous traversons un grain: 25N de vent, 30 en rafales. Nous prenons le 3ème ris. Ça passe, sans casse! Ce "test de résistance" du gréement est rassurant pour la suite.

Dans la soirée, le vent monte à 20N. La mer se creuse et avec ces vagues en travers, Apache se transforme en shaker. Nous dormirons peu! Mais nous sommes surtout inquiets pour le mât!



Un petit grain qui s'approche...         

J12 - Samedi 7 juin - Good bye Beyzano!

Vents entre 20 et 30N toute la nuit. Nous finissons par affaler la GV. La trinquette seule suffit pour tenir 7N, malgré les vagues qui nous secouent dans tous les sens et cassent régulièrement la course du bateau. Apparemment ça tient bien, mais nous avons vu que ça pouvait casser n'importe quand: l'étai s'est cassé alors qu'il y avait à peine 10-15 nœuds!


Nous croisons de nuit un 12ème cargo, qui se dirige vers le sud, puis un 13ème qui nous dépasse au petit matin. Tranquillement posé sur cette mer pourtant forte, il donne envie de finir la route avec lui!

Beyzano, que nous avons régulièrement à la radio depuis notre rencontre, nous demande comment s'est passée la nuit.

Il est temps pour lui de reprendre sa route vers l'Angleterre (encore une douzaine de jours de nav!), et il tenait à s'assurer avant de nous quitter que nous nous sentions en sécurité.



Beyzano négocie une vague           


Merci beaucoup à toi, Stephan, le skipper de Beyzano, et à ton équipage -- Rob, Georges et Calvin -- d'avoir veillé sur nous ces derniers jours! Et toutes nos excuses à vos familles respectives pour les heures que vous aurez passées en trop en mer à cause de nous! En France, on dit "merci, vous êtes un ange", c'est vraiment ce que vous aurez été pour nous pendant ces quelques jours!

Gros coup de blues en entendant qu'ils s'en vont, mais nous devrions être arrivés dans moins de 3 jours, ça va vite passer... et puis après cette première nuit de gros temps sans problème, nous sommes effectivement (un peu) plus confiants concernant le mât.

Mais il est temps que ça se termine... Nous avons envie d'un bon lit frais et stable, d'une nuit complète, de nous laver les cheveux, de manger des fruits frais... et d'une énorme glace!!!

En même temps, je (Carole) repense à un passage du "Château de ma mère", que je viens de re-re-re-relire: c'est la fin de vacances merveilleuses passées dans les collines, les adultes sont heureux de rentrer pour retrouver leur confort, seul le petit Marcel (Pagnol) est triste, et plus encore quand il entend son oncle Jules adoré dire :

"- Eh bien moi, ce qui m'a manqué; ce sont des cabinets confortables, sans fourmis, sans araignées, sans scorpions et munis d'une chasse d'eau."

"Voilà donc à quoi il pensait, ce grand buveur de vin : parmi le thym, le romarin et les lavandes, au chant des grillons et des cigales, sous le ciel d'un bleu vif, il n'avait pensé qu'à ÇA, et il l'avouait"!!"

Il ne faut pas que nous oubliions que cette transat est un moment spécial : nous sommes au milieu de nulle part, coupés du monde, ce sont des instants magiques, que nous ne retrouverons plus. Alors oui, il faut se déplacer en se tenant à deux mains, voir valser les assiettes et couverts sur la table, ne pas s'énerver quand une troisième assiette de taboulé se renverse sur les genoux de son propriétaire, se réveiller la nuit pour aller s'allonger dans le cockpit ("c'est à toi!"), dans la nuit froide et inquiétante, et économiser l'eau et les vivres....

Mais la transat aller nous a appris qu'au lieu de compter les jours comme un prisonnier qui attend sa libération, il vaut mieux compter les jours qui restent à vivre cette aventure tous ensemble, comme un enfant qui compte avec tristesse les derniers jours de grandes vacances. Bien sûr, l'angoisse est toujours là, et l'arrivée sera une bonne nouvelle. Mais contrairement à ce que nous semblions attendre à l'aller, il n'y aura ni récompense, ni médaille ou diplôme à l'arrivée. Comment? Au ski, après une semaine, on revient forcément avec une étoile en plus, alors là, l'Atlantique, ça vaut bien... une palme d'or, non? Non, non, rien. C'est bien que l'essentiel est ailleurs ; ça vaut juste l'immense fierté de l'avoir fait. Et ça vaut aussi le coup d'en profiter et d'apprécier chaque instant. Ce qui ne nous empêchera pas de demander une double dose de chantilly sur nos glaces!!!


Ces derniers jours sont très éprouvants: avec cette mer, les enfants sont interdits de sortie. Et les parents ne passent dehors que le minimum nécessaire pour la surveillance des alentours et les réglages de (l'unique) voile.

La surveillance demande d'ailleurs, de jour comme de nuit, une vigilance accrue car l'horizon est masqué par les vagues: il nous faut donc plusieurs balayages pour nous assurer qu'il n'y a pas de danger. Heureusement, la plupart du temps, le ciel est dégagé et la visibilité assez bonne.



Alors Marin, c'est comment cette traversée?   


17h: 155M parcourus en 24h, 1517 depuis le départ.

Nous apercevons à quelques centaines de mètres une nouvelle perche d'homme à la mer! Rien de tel que ces signes funestes pour nous miner le moral!...

Dans la soirée, un cargo répond à notre demande de prévision météo. Pas de changements significatifs d'ici l'arrivée. Merci, bonne route!

Un autre cargo (j'arrête de compter) nous double un peu plus tard.


Dimanche 8 juin - J13 - Le vent est contre nous - Panne moteur!

Le vent souffle à 20-30N toute la nuit et tourne à l'est -sud-est: pour éviter le près qui solliciterait trop le gréement, nous modifions d'autant notre route vers le nord. La conséquence est que nous aurons besoin de vent plus favorable d'ici demain si nous ne voulons pas rater notre destination!

La mer reste forte elle aussi: Apache prend en permanence de bonnes claques sur le côté, et des paquets d'eau passent régulièrement par dessus le pont et le cockpit.

Le matin, les conditions n'ont guère changé. Mais il fait jour, il fait soleil, on se sent mieux!

Nous sommes toujours sous trinquette seule, et depuis cette nuit, le moteur tourne non stop. L'objectif est d'essayer de maintenir une vitesse de 7N pour tenter une arrivée à Horta demain avant la nuit (il reste 250M). Mais il faudra aussi faire avec les éléments: si le vent continue à refuser (c'est à dire tourner pour nous venir dans le nez), si la mer devient plus dure, nous devrons tenir une nuit de plus!

Un cargo répond d'ailleurs à notre demande de météo. Tendance à l'accalmie dans la nuit, et rotation du vent au sud ouest demain: si cela se confirme, c'est parfait: cela nous permettra de revenir sur la route.

A 14h, le moteur s'arrête! Nous le redémarrons à plusieurs reprises mais il recale aussitôt... Décidément, le sort s'acharne sur nous: plus de radio BLU, plus de météo, un gréement qui ne demande qu'à s'effondrer, plus de génois, le vent qui refuse et maintenant plus de moteur!!!

Bon allez on se calme, on essaie de régler le problème: le moteur démarre, mais ne tient pas? Probablement de l'air ou une saleté dans le circuit. Malgré le roulis du bateau, nous passons 3h à faire de la mécanique dans les vapeurs de diesel: démontage / nettoyage du pré-filtre, remplacement du filtre, purge du circuit d'alimentation... rien à faire, le moteur ne veut rien savoir!...

Tant pis, nous sommes fatigués, et peut-être pas assez lucides pour réparer la panne maintenant. Pour le moment pas besoin de moteur. Nous y repenserons après une "bonne nuit" de sommeil (on peut rêver!).

A 17h, nous croisons un cargo qui nous confirme que le vent devrait tourner au sud-ouest, donc nous permettre de reprendre le cap sur Horta. Nous avons parcouru 153M ces dernières 24H, et 1670 depuis le départ. Reste 190M pour Horta, désormais impossible à atteindre d'ici le lendemain soir ;-(

La nuit arrive avec 30-35N de vent...et puis l'anémomètre décide de se coincer lui aussi... plus d'info sur la force du vent. Bon, tant pis!


J14 - Lundi 9 juin - Arrivés à Vila Das Lajes (Flores) - YeeeESSS!

Le vent reste à force 7 toute la nuit. Et refuse de tourner! Nous décidons de changer d''île d'arrivée: nous irons sur Flores, "l'île la plus occidentale d'Europe" (les Açores sont portugaises). de toute façon, nous n'avons pas le choix, nous pouvons même nous estimer heureux d'avoir Flores sur la route, sans quoi nous aurions pu naviguer encore longtemps avant de trouver de la terre!

Une lumière un peu en avant dans la nuit: c'est le voilier français Emma, qui va aussi sur les Açores. Lui aussi est en panne de moteur et envisage une arrivée au mouillage à la voile. Nous ne nous sentons pas aussi à l'aise et prévoyons plutôt un appel radio pour demander de l'assistance à l'arrivée. Un bateau pilote devrait pouvoir nous accueillir, d'après notre vieux guide.


A 4h30 locales, nous appelons. C'est Florence, au mouillage sur son voilier Balaou, qui nous répond (désolés de t'avoir réveillée!). Non, il n'y a plus de capitainerie ni de pilote dans ce petit port depuis bien longtemps. Il ne s'agit que d'un mouillage; il y a bien un quai, mais réservé aux cargos et aux pêcheurs.

Mais sans moteur, nous préférons ne pas mouiller, car si l'ancre dérapait, nous ne pourrions rien faire. Florence nous rassure, nous pouvons nous installer sur un quai, il n'y a que très rarement des cargos.



Nous nous mettons à la cape au large du petit port de Vila Das Lajes, en attendant que l'organisation se mette en place.

Emma entre dans la baie et mouille sans assistance. Vient notre tour. Mais nous avons trop dérivé pendant la mise à la cape, et il nous faut revenir au près serré. Mais sous trinquette seule, poussés par le vent et le courant, nous nous approchons dangereusement des récifs. Virement de bord pour s'éloigner, puis nouvelle tentative: cette fois c'est la bonne. Nous rentrons dans la baie, affalons la trinquette, envoyons des bouts aux annexes venues nous aider. Elles nous amènent le long du quai où nous nous amarrons... Ouf! Merci à Flo et Béru de Balaou, à Daniel de Jac Daniel, et aux autres venus aussi à la rescousse. Et encore désolé pour ce réveil matinal!

5h du matin heures locales (=UTC): après 13,5 jours de nav et quelques vilains ennuis, nous voilà arrivés sains et saufs! La pression peut retomber!

Il nous tarde une bonne nuit de sommeil, avant de nous occuper de réparer le moteur, l'étai et la BLU, nettoyer et ranger le bateau qui en a bien besoin, laver le linge qui commence à moisir, mettre en ligne le carnet... bref, la routine!

Après, si le temps le permet, nous prendrons peut-être le temps d'aller faire un tour dans cette île réputée magnifique par beau temps... Mais pour l'instant, nous sommes toujours en pleine dépression (atmosphérique!!, nous ça va!!!), et pour quelques jours encore!

JP et Carole

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