Plus
dangereux que le chant des sirènes: L'appel
de Cadix
Nous arrivons donc dans la baie de Cadix; même
si ça n'est pas la destination prévue,
c'est l'Europe, la vraie, notre continent, c'est
l'Espagne, que nous aimons.
Nous arrivons donc enchantés, et même
en chantant, pour apprendre aux enfants que "la
Belle de Cadix a des yeux de velours..."
Nous avons choisi la marina de Puerto Sherry,
nos guides sont formels, c'est la mieux équipée
du littoral Atlantique pour effectuer des travaux.
C'est parfait, c'est ce qu'il nous faut.
Personne pour nous accueillir sur le mal-nommé
ponton d'accueil d'une marina béton, mais
ça ne fait rien, nous sommes contents,
nous sommes arrivés, la boucle est bouclée,
holà, retour à l'espagnol, "la
belle de Cadix a les yeux de l'amour...."
Et puis... nous déchantons très
vite: pas un sourire, ni même un "bienvenue!",
pour nous demander 125 euros: 1ère nuit
payable d'avance, caution pour les clés
des douches, pour les clés de ponton, pour
les clés de la laverie... vive l'Europe
et les prix exorbitants de la haute saison!
Cette marina est isolée, à 15 km
de Cadix, il n'y a aucun bus, il faut appeler
un taxi, parfois il est d'accord pour venir nous
chercher... normalement il y a une piscine, mais
elle est fermée pour entretien annuel (riche
idée, en plein mois de juillet...)...
Bien sûr, nous ne sommes pas vraiment là
pour faire du tourisme: il s'agit d'une escale
technique... Allez, tout va vite se passer, pensons-nous
alors...
Mais dans la soirée, les paroles de la
chanson sont déjà modifiées
" dans la marina de Cadix, il fait chaud
comme dans un four... la marina de Cadix, si vous
pouvez, faites un détour!!"
Il nous faut plus de trois jours pour arriver
à faire venir LE mécanicien du chantier
à bord. Verdict : c'est l'inverseur, il
faut sortir le moteur, il faut sortir le bateau
de l'eau, et non, il ne peut rien faire avant
"semana proxima".
Mais quel jour? ah, il ne sait pas, entre lundi
et samedi.
Et combien de temps prévoit-il pour les
travaux? Il ne sait pas du tout. Super.
A part "qué calor", il ne veut
donner aucune réponse à nos questions...
Quand il nous apprend qu'à Puerto Sherry,
pour des questions d'assurance, nous ne pourrons
pas vivre à bord du bateau pendant les
travaux, nous décidons de changer de marina:
direction le Club Nautico de Santa Maria!
Santa Maria est une petite ville (75 000 habitants)
à 20km de Cadix, et à 5 de Puerto
Sherry. La marina est en plein centre ville, il
y a des jardins ombragés, deux grandes
piscines... notre quotidien s'améliore
nettement!
Nous nous promenons beaucoup dans la vieille
ville, et nous sentons vraiment bien. Avec ses
lauriers roses et bougainvilliers, ses caves de
vin en plein centre (c'est la ville du Xérès),
comme disent les enfants, "ça sent
Toulon, ça sent Pollestres (Perpignan)...et
ça ressemble à Aix-en -Provence!"....nous
nous mettons très vite à l'heure
espagnole, et profitons des soirées animées...
pipas, tapas y aceitunas!
Dans les rues de Santa Maria
Nous nous sentons bien à Santa Maria,
et réalisons avec plaisir que les touristes
ici sont tous espagnols, alors que partout ailleurs
sur la côte espagnole, c'est l'invasion
de touristes allemands, anglais, français
ou belges!
Nous rencontrons des Français, installés
à Santa Maria depuis 4 ans; partis pour
plusieurs années sabbatiques, Jean-Claude,
Véronique et leurs 3 enfants se sont arrêtés
là, estimant qu'ils avaient trouvé
ce qu'ils cherchaient, une qualité de vie,
sans le stress français... Leurs deux filles
de 10 et 12 ans viennent de partir en vacances
chez les grands-parents pendant un mois... les
nôtres sont déçues, mais ne
tardent pas à trouver des amis à
la piscine !
Malheureusement, côté travaux, rien
n'avance. Nous espérions pouvoir sortir
le bateau sur le petit chantier de la marina et
y faire venir le mécano de Puerto Sherry
(ceux du Club Nautico étant déconseillés).
Mais ce dernier n'était pas un cas isolé,
ils se révèlent tous incapables
de nous donner une date de sortie d'eau, un tarif,
un délai... là aussi, "qué
calor" et "semana proxima" sont
les seules réponses...
Nous commençons à perdre patience
: nous n'arrivons pourtant pas d'un Paris speed,
non, nous venons de contrées où
la nonchalance est omniprésente... mais
ce qui agace ici, c'est la désagréable
impression qu'ils le font exprès, qu'ils
sont contents de nous faire mariner... la mauvaise
réputation de nos garagistes français
est vraiment exagérée par rapport
à ça!
Nous finissons par trouver un début de
solution, la "moins pire" possible:
Jean-Claude et Véronique, qui viennent
de s'acheter un nouveau bateau ("Lubaïane",
un Feeling aussi, un 486, soit 4 pieds de plus
que le nôtre, et 5 cabines s'il-vous-plait!),
nous proposent très gentiment leur second
bateau, qui est vide et en vente, le temps de
nos travaux...
Ainsi, nous ramenons Apache à Puerto Sherry,
où nous le mettons sur bers. Et vivons
à 5 km de là, à Santa Maria,
sur le bateau Ailatan!
Lundi 14 juillet, le mécanicien sort l'inverseur...
et conclut que sortir le bateau de l'eau n'était
pas nécessaire (il avait parlé au
début de démonter aussi l'arbre
d'hélice)... à 400 euros la sortie
d'eau, on aurait bien aimé qu'il y réfléchisse
plus tôt... nous lui offririons bien un
feu d'artifice de baffes, mais notre sort est
entre ses mains... nous sommes bel et bien coincés
maintenant... ah, ça ira, ça ira...
Nous avons alors droit au sketch "Il faut
commander les pièces, et on ne sait pas
combien de temps ça prend, si ça
se trouve, ça viendra du Japon, il faudra
au minimum 1 mois..." Nous lui expliquons
que nous pouvons essayer d'appeler en France pour
trouver les pièces, ça prendra peut-être
moins de temps... "Bon, si vous voulez vous
en occuper, moi, je ne touche plus votre bateau..."
Dur de rester calme!...
Voyant le temps restant en juillet et août
s'amenuiser, nous imaginons déjà
laisser le bateau ici, et rentrer en France en
voiture ou en avion... "drôle"
de fin pour ce voyage!...
Nous tannons le mécano tous les jours,
ce qui l'agace évidemment, pour obtenir
une date (et un prix, mais coincés comme
nous le sommes, le prix n'a plus d'importance,
et de toute façon, nous n'aurons pas
le choix...). Aux dernières nouvelles,
ce mardi 22 juillet, il devrait recevoir les pièces
(de Hollande!), sous 7 jours, "approximativement,
peut-être...". Réparation le
jour suivant, remise à l'eau dans la foulée...
Espoir de départ? - Nouvelle maison - Autres
travaux
Nous reprenons espoir et commençons à
entrevoir la possibilité de partir la semana
proxima, vers le Maroc, et tant pis pour la Tunisie...
en attendant, qué calor!!!
Ce temps d'attente n'est pas complètement
perdu: nous avons trouvé une nouvelle maison
sur Chartres, moins chère, plus petite,
mais avec un plus grand jardin, et peut-être
des locataires pour nous remplacer dans l'ancienne!
Vive internet, vive les SMS, et surtout, merci
aux amies qui ont fait circuler efficacement les
infos sur place!
Nous profitons aussi d'être coincés
et d'avoir le bateau au sec pour faire quelques
travaux:
Dessous:
- Reprise du joint de quille
- Retouches d'antifouling (quille, passe-coque)
Dedans:
- Réparation d'une fuite du réservoir
d'eau avant: un vrai gros boulot, avec sortie
du réservoir (130kg) de son logement, soudures,
sicaflex, repose. Merci Bastien de Lubaïane
pour le coup de main!
- Calage réservoir gasoil
- Nettoyage des fonds de cale
- Calage des planchers
- Collage des vaigrages
Dessus:
- Remplacement des rivets de fixation du hale-bas
sur le mat
Essentiellement des travaux courants de maintenance,
mais que l'on a souvent tendance à reporter.
Très bien, tout ça, c'est fait,
la "TODO-list" s'en trouve d'autant
allégée!
Je passe donc une bonne partie des journées
au chantier, sur (ou sous) Apache, pendant que
la famille tue le temps entre le marché
en ville, la piscine de la marina et à
bord du bateau aux heures de sieste de Fleur.
Oui, il y a pire, mais ça n'est pas non
plus ce que nous avions espéré...
nous avons une sacrée sensation d'enfermement,
et la chaleur est accablante.
Cela nous permet de vérifier que l'Espagne
détient bien la triste seconde place mondiale
du taux d'obésité infantile... Il
faut dire qu'ils sont en poussette jusqu'à
au moins 5 ans (Domitille est scandalisée,
"à 5 ans, on est GRAND!"), et
se nourrissent de chips, bonbons et sodas toute
la journée...
Véronique nous raconte qu'à l'école,
nombreux sont ceux qui n'ont pas eu le temps de
prendre leur petit déjeuner, alors à
8 h du matin, ils arrivent avec une canette de
soda et un paquet de chips.
Voilà ce que ça donne, de laisser
tomber une alimentation réputée
grasse, et vive les tortillas et l'huile d'olive!
Nos rapports avec le mécanicien ont un
peu changé depuis que nous lui avons bien
fait comprendre qu'il fallait qu'il arrête
de nous répondre systématiquement
"semana proxima"; maintenant il répond
"sûrement demain", et ça
dure depuis une semaine...
Quand je ne suis pas au chantier, nous allons
nous balader dans la vieille ville, décidément
très agréable. Nous voulions visiter
la "plaza de toros", l'une des plus
grandes arènes d'Espagne, mais pas de chance,
il n'y a plus de visite jusqu'à nouvel
ordre, et pas de corrida avant le week-end prochain...
le week-end prochain, nous espérons bien
être partis!
Visites en Dalousie
Samedi 19 juillet: visite de Cadix, AR en ferry
depuis santa Maria.
Cadix est LA grande ville, beaucoup plus touristique
que Santa Maria, avec les boutiques classiques
des grandes chaînes espagnoles (ZARA, Mango,
CASA) mais aussi internationales. Ses dédales
de vieilles ruelles grouillantes nous plaisent
beaucoup.
Mercredi 23 juillet: après Cadix, nous
visitons Xeres, à près de 30 km
de Santa Maria. Aller-retour en train. Encore
une très belle ville, très agréable,
avec un grand centre ancien très bien restauré,
plein de vieilles pierres, sans oublier ses caves
à vin de Xeres (ou Sherry).
Tio Pepe, un des grands producteurs de Xeres
L'Andalousie a beaucoup de cachet, et dans d'autres
conditions, nous l'aurions vraiment appréciée...
Nous sommes pourtant un peu déçus
de constater que les gens ne sont pas du tout
accueillants, voire désagréables
avec les touristes. Peut-être justement
parce qu'ils ne souhaitent pas que le tourisme
se développe plus que ça, ils sont
très contents d'être les irréductibles
qui résistent encore et toujours à
l'envahisseur rougeaud... pas si fous ces Andalous!
Départ!
Jeudi 24 juillet: ça y est, les pièces
arrivent enfin! Bonne nouvelle, le remontage est
fait dans la foulée!
En tentant de me facturer le double des heures
de travail, le mécano me donne une dernière
occasion de lui dire tout le mal que je pense
de lui et de ses méthodes. Nous n'avons
jamais fait de pub dans nos carnets, mais là,
c'est d'utilité publique, et il est prévenu:
surtout, n'allez pas voir Paco chez Nautica Del
Sur!
Vendredi 25 juillet: Règlement de l'entrée/sortie
d'eau et des 11 jours :-( sur bers, remise à
l'eau d'Apache, petit essai en mer pour vérifier
que tout est ok, retour à Santa Maria pour
récupérer l'équipage -- qui
ne cache pas sa joie de retrouver son Apache--,
approvisionnement...
YES!!!!! Apache est prêt à repartir...
cet après-midi même!
Le vent est bien orienté pour passer Gibraltar,
et nous avons en effet assez perdu de temps! Après
la Tunisie (vraiment trop loin), nous laissons
aussi tomber Ceuta au Maroc, ainsi que la Sardaigne
qui était sur la route du retour de Tunisie.
Nous irons directement sur les Baléares
si la météo reste favorable. Sinon,
refuge sur la côte Espagnole.
Nous partons donc finalement encore pour une
grosse nav: 5-6j! C'est le prix à payer
pour avoir un peu de temps une fois aux Baléares,
de profiter des mouillages et d'Apache, avant...
le retour en France!...
Merci encore Jean-Claude et Véronique
pour votre gentillesse!
Au revoir Andalousie!